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CHAPITRE III


Montevideo. — Maldonado. — Excursion au rio Polanco. — Lassos et bolas. — Perdrix. — Absence d’arbres. — Daims. — Capybara ou cochon de rivière. — Tucutuco. — Molothrus, habitudes ressemblant à celles du coucou. — Gobe-mouches. — Oiseaux moqueurs. — Faucons se nourrissant de charognes. — Tubes formés par la foudre. — Maison foudroyée.


Maldonado.


5 Juillet 1832. — Nous mettons à la voile dans la matinée et sortons du magnifique port de Rio. Pendant notre voyage jusqu’à la Plata nous ne remarquons rien de particulier, si ce n’est un jour un troupeau considérable de marsouins, au nombre de plusieurs milliers. La mer entière semblait sillonnée par ces animaux et ils nous offraient le spectacle le plus extraordinaire, quand des centaines d’entre eux s’avançaient par bonds qui faisaient sortir de l’eau leur corps tout entier. Alors que notre vaisseau faisait ses neuf nœuds à l’heure, ces animaux pouvaient passer et repasser devant la proue avec la plus grande facilité et s’élancer au loin en avant. Le temps devient mauvais au moment où nous pénétrons dans l’embouchure de la Plata. Par une nuit fort sombre nous sommes environnés par un grand nombre de phoques et de pingouins qui font un bruit si étrange, que l’officier de quart nous assure qu’il entend les mugissements des bestiaux sur la côte. Une autre nuit il nous est donné d’assister à une magnifique représentation de feux d’artifice naturels ; le sommet du mât, les extrémités des vergues, brillaient du feu Saint-Elme ; nous pouvions presque distinguer la forme de la girouette, on aurait dit qu’elle avait été frottée avec du phosphore. La mer était si lumineuse, que les pingouins semblaient laisser derrière eux un sillon de feu, et, de temps en temps, les profondeurs du ciel s’illuminaient soudain à la lueur d’un magnifique éclair.

À l’embouchure du fleuve, j’observe avec beaucoup d’intérêt la lenteur avec laquelle se mêlent les eaux de la mer et celles du