Page:Daudet - Contes du lundi, Lemerre, 1880.djvu/358

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temps-là changeait souvent de domicile, ou bien que mon cocher, pour ne pas déroger aux habitudes de son droschken, s’était mis dans l’idée de me faire visiter quand même la ville et ses environs. Toujours est-il que notre matinée se passa à courir Munich dans tous les sens, à la recherche de cette ambassade fantastique. Après deux ou trois autres tentatives, j’avais fini par ne plus descendre de voiture. Le cocher allait, venait, s’arrêtait à certaines rues, faisait semblant de s’informer. Je me laissais conduire, et ne m’occupais plus que de regarder autour de moi… Quelle ville ennuyeuse et froide que ce Munich, avec ses grandes avenues, ses palais alignés, ses rues trop larges où le pas résonne, son musée en plein vent de célébrités bavaroises si mortes dans leurs statues blanches !

Que de colonnades, d’arcades, de fresques, d’obélisques, de temples grecs, de propylées, de distiques en lettres d’or sur les frontons ! Tout cela s’efforce d’être grand ; mais il semble qu’on sente l’emphase de cette apparente grandeur, en voyant à tous les fonds d’avenue les arcs de triomphe où l’horizon passe seul, les portiques ouverts sur le bleu. C’est bien ainsi que je me représente ces villes imaginaires ; Italie mêlée d’Allemagne, où Musset promène l’incurable ennui de son Fantasio et la per-