Page:Daudet - Jack, II.djvu/344

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ries. Les autres écoutaient, la bouche ouverte, ce bavard somnolent et intarissable, pendant que le vent soufflait sur les tisons éteints et que la grosse toux de Jack résonnait sous ses draps.

— Ce n’est pas tout ça, dit madame Bélisaire, qui ne s’égarait jamais longtemps loin de son sujet. Qu’est-ce que nous allons faire ? Nous ne pouvons pas laisser ce pauvre garçon s’en aller faute de soins.

Les Levindré opinèrent :

— Il faut faire ce que le médecin vous a dit. Il faut le conduire au parvis Notre-Dame, au bureau central. Là, on lui donnera une carte d’entrée pour un hospice.

— Chut !… chut !… pas si fort… dit Bélisaire en leur montrant l’alcôve où le malade s’agitait dans la fièvre. Il y eut un moment de silence, pendant que les draps froissés faisaient crier leur grosse toile.

— Je suis sûr qu’il vous a entendus, ajouta le camelot d’un air fâché.

— Le beau malheur… Ce n’est ni votre frère, ni votre fils ; et vous vous débarrasseriez joliment en le conduisant à l’hôpital.

— C’est le Camarade ! dit Bélisaire, en mettant dans sa façon de parler toute la fierté et le dévouement de son brave cœur naïf. Ce fut si émouvant que la porteuse de pain en devint toute rouge, et regarda son mari avec des yeux brillants de larmes. Les Levindré s’en allèrent en haussant les épaules ; et quand ils