Page:Daudet - L'Évangéliste, 1883.djvu/75

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

elle nous a regardés ?… J’ai cru qu’elle entrerait par la fenêtre.

– J’aurais voulu voir ça… », répondit la marine, sans conviction. Et tant qu’ils sentent cette femme là-haut sur leurs têtes, cette voiture en face d’eux qui leur masque la rue, ils restent immobiles, n’osant parler, respirer, ni planter un clou. Enfin on entend la voix de Mme Ebsen reconduisant quelqu’un sur le palier. Une robe passe dans le couloir, frôle la porte. Elle va sortir. L’élève du Borda, pour s’en assurer, soulève un coin du rideau et le rabaisse bien vite. La femme est là, qui le regarde goulûment derrière la vitre, comme si elle voulait l’emporter. Puis un battement de portière, des chevaux qui piaffent, s’enlèvent, et l’ombre que faisait la voiture devant la croisée s’en va comme un mauvais rêve. « Eh ! ben, vrai !… » dit la petite Fanny dans un soupir de soulagement.

*

Le soir, quand Lorie monta pour la leçon, il trouva Mme Ebsen toute remuée encore et glorieuse de sa belle visite.

« Mais oui, qui donc est venu ? On m’a parlé d’une voiture… »