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Page:Daudet - La Police et les chouans sous le Consulat et l’Empire, 1895.djvu/267

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l’exigerait. De cette époque est datée une éloquente lettre qu’il avait écrite à Fouché. Il s’y reconnaissait coupable d’avoir tenté de fomenter une insurrection, mais non d’avoir conçu « l’idée d’un assassinat indigne d’un homme d’honneur. Je n’ai voulu que renverser le gouvernement. Je demande que mon jugement, si je dois en subir un, soit militaire ainsi que mon exécution ». À la même époque, Mme Aquet de Férolles, trompée par Liquet, était convaincue que Le Chevallier l’avait accusée. Ses interrogatoires trahissent son ressentiment, lequel n’était fondé sur aucune preuve. Comme ceux des autres accusés, ils étaient accablants pour lui, sans qu’il soit démontré que ces malheureux ne l’avaient pas chargé pour se défendre. On y relève ses calculs, les propos qu’il a tenus à ses affiliés pour leur inspirer confiance. Il s’est vanté, disent-ils, d’être assuré du concours de gens haut placés. « Il a débité à ses complices une foule de billevesées, écrivait Savoye-Rollin à Réal, dans le double but de fortifier leur zèle et de s’approprier sans contestation la plus forte part du vol des deniers publics. Il est si facile dans ce pays de réunir les mécontents et de donner de la consistance aux contes les plus absurdes. »

À Paris, on était moins optimiste. On croyait à un vaste complot ourdi contre le régime impérial. Personne n’eût osé prétendre que Le Chevallier avait menti. On lui supposait des amis dans le gouvernement. Un événement extraordinaire vint tout à coup confirmer Fouché et Réal dans cette opinion. Le 26 décembre, Armand Le Chevallier s’évada du Temple par un trou ouvert dans le couloir qui conduisait à sa chambre. Il revenait de chez Réal, qui l’avait interrogé. On trouva sa montre chez le portier. Quant à lui il avait disparu, favorisé sans doute dans sa fuite par de puissants protecteurs. Fouché