Page:Daudet - La Police et les chouans sous le Consulat et l’Empire, 1895.djvu/308

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fatigue, mourant de faim, traqués de toutes parts, ils allèrent se livrer après avoir brûlé leurs papiers. Ils apprirent alors que, depuis quinze jours, Prijent et Bouchard étaient au pouvoir de la police.

Las de sa vie errante, Bouchard avait pris le parti de se soumettre. Le 5 juin, s’étant présenté à la gendarmerie de Dinan, il se fit reconnaître et offrit de révéler la retraite de ses complices si, par avance et pour le cas où il serait ultérieurement condamné, on lui promettait sa grâce. De telles promesses ne lient personne et n’engagent guère ceux qui les font. Le préfet de Saint-Brieuc consulté comprit qu’avant tout il fallait se saisir de Prigent ; il promit. Bouchard, aussitôt, s’exécuta. Il avait laissé Prijent caché dans un champ de blé aux environs de la ville, en compagnie des deux chouans, François Deschamps et Jean Leclerc. Il y conduisit tout droit les gendarmes. Prijent dormait. Ses compagnons veillaient sur lui. À la vue de la troupe armée, sans même le réveiller, ils sautèrent sur leurs fusils et firent feu. Un gendarme eut la cuisse brisée. Les autres répondirent par une décharge générale. Une balle atteignit Leclerc.

Hors d’état de se défendre, il fut pris et désarmé ainsi que Deschamps. Prijent ne s’éveilla que pour constater qu’il était prisonnier. Le lendemain, on le conduisait à Rennes où il fut incarcéré.


III

Depuis la veille, un courrier galopait vers Paris afin de porter la bonne nouvelle au ministre de la Police. Il revint dans les cinq jours avec l’ordre d’envoyer le prisonnier