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Page:Daveluy - Le filleul du roi Grolo, 1924.djvu/67

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vre, faible et sans défense, lui porterais-tu en hâte le coup fatal ? »

Jean se redressa fièrement. « Dans ce cas, seigneur-gnome, je serais doublement lâche de sévir. J’abuserais de la faiblesse. Non, il n’aurait rien à craindre… Maître, maître, reprocha Jean en reculant, les yeux courroucés, qu’avez-vous pensé de me poser une telle question ? Elle n’est digne ni de vous, ni de moi. »

Le gnome rit de bon cœur. « Là, là, petit, ne t’emporte pas ainsi. Tes yeux me foudroient. Pour un peu, tu dégainerais et provoquerais ton vieux maître… Me voilà tranquille. La haine que tu éprouves ne m’effraie plus. Elle n’est que l’inflexibilité, l’impétuosité de la jeunesse en face du mal et de la perfidie… Eh ! eh !… continua le gnome en se frottant les mains, j’ai bon espoir. Nous ferons de toi un vrai gentilhomme. Ton cœur saura commander, à l’occasion, à ta raison hautaine. Et parce que tu auras le culte de la justice, tu craindras de l’appliquer avec rigueur et sans discernement. Mais… et le gnome désigna un autre tableau presque terminé, qu’est ceci, Jean ?… Que voilà une tête fine, douloureuse et résignée !… Et quelle expression de tendresse dans la physionomie de cet adolescent !

Jean se rapprocha. « Vous voyez là, dit-il la voix émue, les traits de Blaise, mon frère chéri, le compagnon de ma jeunesse paisible…