Page:Daveluy - Les holocaustes, 1935.djvu/132

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neuve au courant tout de suite. Il a envoyé avant-hier un Iroquois converti avec de nouvelles lettres pour les missionnaires. Évidemment, ce sauvage est sûr, sincère. Il fera son devoir aux dépens de sa vie. Mais se rendra-t-il à destination ? Tant d’embûches le guettent, sans compter les misères matérielles, et tous les embarras de la saison. Je ne vis plus depuis avant-hier. Je ne songe qu’à cette course confiée non à l’un des nôtres, mais à un sauvage. Je le déplore, tout en reconnaissant l’humanité habituelle de notre gouverneur. Bref, je me sens dans un état de fièvre qui m’enlève tout repos, toute paix d’esprit. Je veux… je veux…

— Tu veux partir, Charlot ? cria derrière lui une douce voix angoissée. Oh ! mon ami, mon ami, que tu es à la fois cruel et… héroïque ! Et Lise se pressa, muette, les yeux en détresse sur le cœur de son mari.

— Lise, ma chérie, dit Charlot, je te croyais endormie… Jamais, jamais, je n’aurais voulu en ce moment te causer du chagrin… Oh ! Lise, ne me regarde pas avec ces pauvres yeux sans larmes… Quel malheur que tu m’aies entendu… Tiens, viens sur ce fauteuil… Perrine va bassiner tes tempes… Et me voilà à tes genoux, ma femme chérie… Pardonne-moi ! Je ne sais que torturer ton cœur… Je t’aime de tout ce misérable cœur pourtant… Lise, regarde-moi, dis que tu me pardonnes ?… Je t’en supplie !