Page:Daviault - Le Baron de Saint-Castin, chef abénaquis, 1939.djvu/120

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
118
LE BARON DE SAINT-CASTIN

vingtaine de personnes. Un autre groupe remontait la Piscataqua et y levait des scalps que Madokawando porta à Québec où Frontenac le paya généreusement 17.

En août. Kittery était ravagé et, le 15 septembre, les Indiens, sous les ordres de Saint-Castin cette fois, attaquaient Deerfield.

Le récit détaillé des opérations engendrerait la monotonie. Les sauvages avaient repris les tactiques de la guerre d’usure, se montrant partout, ne s’exposant nulle part. Ils portèrent la dévastation jusqu’aux portes de Boston.

À la fin de l’année, leur ardeur faiblit, surtout parce que leurs approvisionnements s’épuisaient et que, de nouveau. la France tardait à leur en envoyer. Les navires français avaient viré de bord à la rivière Saint-Jean, signe de la supériorité des Anglais sur mer. Phipps, d’un côté, menaçait de considérer les Abénaquis comme complices d’une agression contre le droit des gens. Pemquid, cette forteresse qui inspirait la crainte aux tribus depuis sa reconstruction, était en état de venger leur perfidie. D’autre part. Phipps leur aurait fait un pont d’or pour les gagner, « sauf à les trahir ensuite » (Charlevoix).

Les dernières déprédations des Indiens avaient causé « de si grands murmures parmi la populace de Boston que le gouverneur Phipps avait flattée d’une espérance de paix assurée avec les sauvages qu’il en a pensé être assommé » 18.

Les pourparlers s’engagèrent. Le 1er mai 1695, plusieurs sachems se présentaient à Wells afin de signer un traité 19. L’affaire débutait mal.

Phipps sommait les Abénaquis de lui donner satisfaction sous vingt jours de la violation de la paix. Les Abénaquis étaient embarrassés. D’un côté, ils craignaient un peu les représailles ; de l’autre, ils auraient assez aimé à poursuivre leurs déprédations. Bacqueville de la Potherie écrit qu’ils étaient partagés entre « l’affection qu’ils avaient pour les Français et l’aversion qu’ils nourrissaient dans leur cœur contre les Anglais ». À vrai dire, leur affection pour la France n’était pas très vive : les approvisionnements n’arrivaient pas. Ils allaient céder aux sollicitations de Phipps quand Saint-Castin et Thury les persuadèrent de ne pas répondre au gouverneur anglais, mais, leur maïs récolté, de se retirer plutôt au fond des bois, hors de l’atteinte de l’ennemi. C’est ce qu’ils firent.