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Page:Daviault - Le Baron de Saint-Castin, chef abénaquis, 1939.djvu/124

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LE BARON DE SAINT-CASTIN

« La Cour avait extrêmement à cœur cette entreprise ; une place fortifiée au milieu des nations abénaquises donnant lieu de craindre qu’à la fin ces sauvages, si nécessaires à la Nouvelle-France, ne fussent accablés par toutes les forces de la Nouvelle-Angleterre, ce qui serait infailliblement arrivé, si les Anglais avaient eu des gouverneurs plus habiles ; ou détachés pour toujours de notre alliance par le défaut de secours de notre part, mais nos ennemis prenaient pour arriver à ce but des moyens qui n’étaient propres qu’à les en éloigner » (Charlevoix, II, 176).

Iberville mettait à la voile de Rochefort au mois de mai, avec trois vaisseaux : l’Envieux qu’il commandait, le Profond sous M. de Bonaventure et le Wesph, commandant Jean Léger de la Grange, corsaire canadien. L’aumônier Jean Beaudoin, ancien mousquetaire du roi devenu jésuite, rédigeait le journal du voyage.

Le 27 juin, la flottille jetait l’ancre à la baie des Espagnols, d’où le Wesph s’en allait chercher à Québec les Canadiens de M. d’Iberville. Germain Bourgeois apportait des lettres dans lesquelles M. de Villebon faisait connaître l’intention manifestée par les Anglais d’enlever le navire du ravitaillement annuel.

On leva l’ancre le 4 juillet. En passant à l’île Verte, le corsaire Baptiste joignit à la flottille son brigantin où 24 sauvages avaient pris place.

Le 14, on mouillait à cinq lieues de la rivière, par un épais brouillard où s’entendaient des coups de canons ; les ennemis se faisaient des signaux. La brume une fois dissipée, sur les deux heures de l’après-midi, M. d’Iberville aperçut trois navires anglais, le New Port, le Sorling et une conserve, qui venaient à lui. Il se porta de l’avant à petite voile. « Le Profond se mit en façon de prise et ne devait ouvrir ses sabords qu’à portée du fusil des ennemis qui allaient être bien reçus de nos gens ». Deux Anglais s’approchant lancèrent leurs volées. Soudain, le Profond ouvrit sa batterie d’en bas et mitrailla. L’ennemi s’enfuit.

« Le grand navire (c’était le Sorling) se trouva à mon travers, écrit M. d’Iberville, il n’avait que 36 canons et il força de voile à ma troisième volée et me dépassa au vent. Le petit, le New Port, de 24 canons, se trouva alors à mon travers ayant essuyé la volée du Profond. Je lui en envoyai deux : la troisième le démâta de son grand mât de hune. Cela l’obligea d’arriver vent arrière, avec toutes ses voiles devant, pour se sauver dans la baie Française ; ce que je l’empêchai de faire, arrivant un peu sur le large en le croisant et le canonnant, étant prêt à l’aborder. Il amena pavillon et mit en panne. Je continuai à chasser le gros, laissant celui-là au Profond à l’amariner Je le joignis à la portée du canon, vers 5 heures. On se canon-