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LA GUERRE DU ROI PHILIPPE

Syll et Hawthorne voulaient se jeter sur les sauvages. Waldron, engagé par sa parole d’honneur, conçut un stratagème qui sauverait au moins les apparences, et « qui, pour la traîtrise, n’a pas son pareil dans les annales indiennes » (Sylvester).


Suivons le récit de Belknap. Le major propose aux Indiens, pour le lendemain, un simulacre de combat à la mode anglaise. Il joint aux deux compagnies de Boston ses propres hommes et ceux du capitaine Frost de Kittery. Après quelques mouvements et la première volée des sauvages, les Anglais encerclent habilement et désarment leurs adversaires, puis séparent les Abénaquis des réfugiés du Sud. Les Abénaquis retournent chez eux (sans doute à cause de l’intervention de Waldron), leurs alliés prennent le chemin de Boston où sept ou huit sont pendus et les autres, vendus en esclavage dans les pays étrangers 18.


Les tribus considérèrent l’incident comme une déclaration de guerre. Leurs délégués s’étaient rendus à Cocheco, comptant sur l’hospitalité de Waldron qui les y avait d’ailleurs invités. La trahison leur parut monstrueuse. Aux yeux des puritains, elle était toute naturelle. Belknap assure que la colonie, en général, l’approuva 19 et Sylvester fait cette réflexion : « Les événements antérieurs démontrent que le sentiment de l’honneur et de l’honnêteté la plus élémentaire était tellement émoussé chez eux qu’un tel exploit devait les réjouir ».

Le 23 septembre, les Indiens en embuscade en face de l’île Munjoy capturèrent six hommes envoyés aux provisions. Après quoi, ils prirent le fortin d’assaut et massacrèrent la garnison. Ce fut le signal de la nouvelle campagne.

Boston dépêcha les capitaines Hawthorne, Syll et Hunting à la tête de deux cents hommes de troupe, vers Casco où ils restèrent jusqu’au début d’octobre. Les Indiens, fuyant dans les bois à leur approche, ne se montraient pas. À peine les trois capitaines avaient-ils repris la route de Boston qu’une centaine de sauvages tombaient sur la garrison-house de Black-Point. Les assaillants étaient commandés par le sachem Mugg, homme tout à fait remarquable qui joua un rôle de premier plan dans les guerres abénaquises.