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Page:David - Laurier et son temps, 1905.djvu/53

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LAURIER ET SON TEMPS

pas que les liens du sang puissent aveugler ma raison au point de me faire confondre le mal avec le bien, mais j’admettrai — et si cela est une faiblesse j’en fais l’aveu — que je ressentirai au cœur une plus profonde blessure si l’on commet une injustice à l’égard de celui auquel je suis uni par une communauté de sang et d’origine qu’envers quelqu’un qui n’est que mon semblable. Je n’admettrai rien de plus. Je ne crois pas qu’il soit vrai que le cœur puisse troubler la raison au point de lui faire confondre le bien avec le mal »…

Laurier fit ensuite la preuve du refus constant du gouvernement de faire droit aux réclamations des Métis et continua dans les termes suivants :

« Enfin, justice était rendue à ces pauvres gens ! Depuis sept longues années, ils avaient pétitionné, mais toujours en vain. Le 26 mars, le premier ministre, de son siège en cette Chambre, avait proclamé que ces hommes n’avaient droit à aucuns privilèges spéciaux, qu’ils n’avaient rien des droits qui avaient été reconnus à leurs frères du Manitoba. Enfin, le temps de la justice était arrivé pour eux. Enfin, ils recevaient ce qu’ils avaient sollicité en vain par plusieurs années de représentations énergiques ; et quelle était la cause de ce changement ?

« En dix jours, du 26 mars au 6 avril, le gouvernement avait changé d’idée et de politique. Quelle était la cause de ce réveil ?… Les balles du Lac-au-Canards ! la rébellion du Nord-Ouest ! Le gouvernement les avait repoussés pendant des années, mais enfin ces hommes avaient pris les armes, et le gouvernement s’était décidé à reconnaître la justice de leurs réclamations. J’en appelle, non seulement aux libéraux qui siègent autour de moi, mais à tous les hommes qui ont dans la poitrine le cœur d’un Anglais, et je leur pose la question : quand des sujets de Sa Majesté ont pétitionné pour leurs droits pendant des années, et que ces droits ont été foulés aux pieds, et quand ces hommes, poussés à bout,