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maison ; ce sont des dragons qui arrivent dans l’espérance de le surprendre. Ils enfoncent les portes, crient, jurent, menacent, cherchent, fouillent partout, et ne trouvant pas celui qu’ils cherchaient, veulent savoir où il est. Ils s’adressent à l’aîné des fils de M. Gagnon, et veulent le faire parler ; comme il refuse, ils se précipitent sur lui, le garrottent et le soumettent à toutes sortes de mauvais traitements. Ils percent de plusieurs coups de baïonnette son frère Jules, et brisent, d’un coup de crosse de fusil, l’épaule de la mère de Mme  Gagnon, une pauvre vieille femme de soixante-quinze ans. L’un des enfants, Médard, vient à bout de s’esquiver et va au-devant de son père pour l’avertir. Il le rencontre à quelques arpents, revenant à cheval de Napierville avec un de ses amis ; il lui raconte ce qui se passe, et le supplie de se sauver. Gagnon refuse, il veut, dans sa colère, aller défendre sa famille. Son ami lui fait comprendre que c’est inutilement vouloir se faire tuer ; il se laisse convaincre et rebrousse chemin, le désespoir dans l’âme.

Mme  Gagnon, ne sachant ce qui se passe, est dans des angoisses mortelles ; elle envoie l’aînée de ses filles, âgée de douze ans, guetter son père. La pauvre enfant passe le reste de la nuit blottie près de la clôture sur le bord du chemin.

Enfin, le jour arrivé, les dragons évacuent la maison, après avoir brisé une partie des meubles, et promettent de revenir bientôt.

Mme  Gagnon, comprenant que sa vie et celle de ses enfants étaient en danger, reprenait, le lendemain, le chemin des États-Unis.

Quelques jours après, Robert Nelson entrait au Canada, à la tête de deux à trois cents réfugiés, et se rendait à Napierville pour donner le signal de l’insurrection et arborer l’étendard de l’indépendance. Gagnon avait été chargé, avec le Dr  Côte, de tenir les commu-