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les patriotes

et descend immédiatement du tribunal, accompagné de M. le juge Gale. Ils ont à peine mis le pied hors de l’appartement, qu’il s’élève le tumulte le plus affreux dans l’assemblée.

« Les cannes se lèvent, les bâtons se croisent, et les dix jurés qui étaient pour l’élargissement sont impitoyablement battus, avant de pouvoir s’échapper de leurs loges. Cinq d’entre eux, MM. Paschal Lemieux, Edwin Atwater, Simon Lacombe, Élie Desève et Jean Cadotte, reçoivent de graves blessures, tant à la tête qu’ailleurs. Les connétables et les officiers de police viennent de l’avant pour mettre les jurés à l’abri de violences ultérieures, jusqu’à l’arrivée d’un détachement de Grenadiers-Gardes. Il n’y a pas jusqu’aux encriers mêmes que ces forcenés ne lancent par la tête des jurés.

« On se dirige du côté de la barre et l’on éteint les lumières qui sont devant le prisonnier. Une grêle de coups menacent le malheureux sans défense ; mais ils sont parés par le geôlier et son adjoint, qui, tous deux, le pistolet à la main, sont obligés de menacer d’une mort immédiate le premier qui osera lever la main sur lui.

« Les jurés sortent enfin du Palais-de-Justice, sous la protection des Grenadiers-Gardes ; et le capitaine Jalbert est escorté jusqu’à la prison par un parti du 7e Hussards. Une partie de l’assemblée est obligée de se retirer dans la chambre des juges, pour se mettre à l’abri du désordre et de la confusion. Les deux jurés, Maybell et Fraser, qui étaient pour la condamnation du prévenu, sont reconduits chez eux, par leurs partisans, qui les portent en triomphe sur leurs épaules. La foule se disperse, et ainsi se termine (sans se terminer) ce procès où semblait se concentrer tant d’animosité de la part de cette population jadis si loyale, mais aujourd’hui, enfin, devenue révolutionnaire !…