Page:Daxhelet - Nouvelles de Wallonie, 1894.djvu/60

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Son regard perdu semblait sonder la chevelure embroussaillée des hauteurs d’en face. Il rêvait, l’oreille attentive au murmure de la brise ou au chant des oiseaux, reniflant, pauvre esseulé, cet air – extrêmement vif et trop brûlant pour sa faible poitrine, – qui fait de Marnève l’Éden des forts et le cimetière des débiles.

Parfois il s’aventurait jusqu’au carrefour voisin, d’où sa vue pouvait s’étendre un peu. Derrière lui et comme au-dessus de sa tête, une raide et affreuse montée, vrai calvaire, qui relie le hameau au village. A ses pieds, un sol qui fuit en pente abrupte, jusqu’au filet d’eau clapotant dans le creux de l’humide et herbeuse vallée. Devant ses yeux, à deux cents mètres à peine, le talus escarpé du coteau pensif aux innombrables versants, se noyant dans la brume et se confondant avec l’horizon, là-haut, tout au bout. Des deux autres côtés, le fond vert ou fauve du feuillage, avec, à gauche, la trouée grise de la route et, plus près, quelques maisons à toits rouges, piquées sur des mamelons, auréolées de frondaisons.

Pour Jacques, ce coin fut longtemps le bout du monde ; il s’y plaisait, nourrissant son imagination de la contemplation de ce paysage