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Page:De Bachaumont - Mémoires secrets Tome 2 - 1766-1769 - Ravenel - Ed. Brissot-Thivars - 1830.djvu/421

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MARS 1769

même à son génie très-caustique, et tombe à droite et à gauche sur une infinité de choses et sur une multitude de gens. Tout cela n’est qu’un rabâchage, une répétition fastidieuse des injures qu’il a déjà débitées ailleurs et d’une façon au moins plus passable.

20. — Il court aussi une Épître en vers de M. de Voltaire à l’auteur du livre des trois Imposteurs. Ce grand homme s’y élève avec force contre l’athéisme, en détruit, en poète, tous les raisonnemens qu’il fait ailleurs, en philosophe, en faveur du même système ; mais on sait qu’il est accoutumé à prêcher le pour et le contre. Cette pièce, où il y a de temps à autre de beaux vers, est en général lâche, prosaïque, et se sent de la décrépitude du faiseur. Il a entremêlé un sujet aussi grave de mille plaisanteries, dont il ne peut s’abstenir, et qui donnent un air de farce à ses ouvrages les plus sérieux. Il finit par prêcher le tolérantisme, et après avoir fait manger du porc à un Juif avec un Français, et boire du vin à un Turc avec un docteur de Sorbonne, il s’écrie :


Mais qui pourra jamais souper avec Fréron ?


et laisse le lecteur sur ce bon mot.

22. — Deux nouveaux livres infernaux percent à Paris, dans ce saint temps où l’Église redouble de ferveur et de prières pour la conversion des incrédules ; l’un a pour titre : Opinion des anciens sur les Juifs, par feu M. de Mirabaud, secrétaire perpétuel de l’Académie Française ; l’autre est intitulé : Réflexions importantes sur l’Évangile. Ces deux ouvrages, connus comme manuscrits depuis long-temps, et gardés dans l’obscurité des portefeuilles des curieux ou des esprits forts, sont dans le goût de ceux attribués à Fréret. Il y a autant de