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Page:De Bachaumont - Mémoires secrets Tome 3 - 1769-1772 - Ravenel - Ed. Brissot-Thivars - 1830.djvu/35

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JUILLET 1769.

prodigieux, et bien des gens des plus attachés à la Compagnie des Indes, qui jusqu’à présent en avaient désiré la continuation, intimidés par les assertions de cet auteur, en veulent aussi ardemment l’extinction. Ce n’est pas que dans le livre même on ne pût trouver la propre réfutation du détracteur, mais ce travail et cet examen ne peuvent être l’ouvrage du gros des actionnaires, gens à préjugés, qui se coiffent de la première opinion qu’on leur inculque, et chez qui il est toujours essentiel de gagner de primauté. Aussi le ministère a-t-il senti de quelle importance il était de frapper ce coup avant qu’il parût aucune apologie en faveur de la Compagnie. On permet aujourd’hui à l’administration de répliquer ; mais elle a ordre, à ce qu’on assure, de se renfermer dans la justification de ses calculs, et de borner là ses réflexions. Cependant des particuliers intéressés à la chose, et aussi zélés qu’instruits, s’occupent à discuter les points les plus essentiels ; ils prétendent prouver des erreurs que l’abbé Morellet a travesties en vérités, découvrir des sophismes qu’il a donnés comme des raisonnemens, démasquer l’infidélité de ses exposés, et renverser son système de fond en comble. Les amis de cet abbé annoncent que, sentant lui-même les endroits faibles de son Mémoire, il fait imprimer un supplément, où il se redressera et préviendra les réponses ou les objections qu’on pourrait lui faire.

On assure que M. le comte de Lauraguais, qui jusqu’à présent avait paru opposé à la continuation de la Compagnie, mais qui dans le fait ne voulait la dissoudre que pour anéantir l’administration et faire reprendre une nouvelle vie à cette société, a écrit avec autant de zèle que de vérité aux ministres et à l’abbé Morellet lui-même,