Page:De Coster - Contes brabançons, 1861.djvu/222

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et de ma peau avec ton benoît couteau. Ha tu ne veux rien moins que Roosje, tu l’auras sans remise mon ami, tu l’auras. Nous autres brabançons, nous devons besogner dur, avant d’obtenir quoi que ce soit, mais à ces mécréants bénis d’eau de chameau, il ne faut qu’un mot, un traître mot, lequel agit tout soudain comme un charme. Tue et prends, mon gentil museau, prends et tue, Roosje et moi nous t’allons laisser faire incontinent.

Ce disant, Ser Huygs avait l’œil si vif, parlait si gaîment et portait si haut la tête, que Johanna reprit courage, et dit :

— Je t’aime ainsi, mon homme…

Roosje, la douce vierge, pensa pouvoir aussi parler, croyant assurément que la bonté qui sortirait de son cœur toucherait l’africain mal déguisé qui venait en leur calme maison chercher à répandre le sang et à la prendre elle-même.

— Ha, monsieur de l’étranger, dit-elle, ne voyez-vous point comme nous sommes ici toutes transies, ma sœur et moi, à voir votre méchant visage que moi, tantôt, je vis si bon en allant à l’église ?

Elle lui sourit et de ses beaux yeux implorait qu’il lui rendit son sourire : mais le mécréant ne sourit pas plus qu’un bloc et répondit :