Page:De Coster - Contes brabançons, 1861.djvu/223

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— Bataille perdue, bataille à livrer derechef, blessures pour blessures, sang pour sang, femme pour femme.

Mais Ser Huygs impatienté :

— Sais-tu bien, dit-il, que ta trogne brûlée me réjouit comme un tintamarre. Sais-tu bien que la moutarde me monte au nez et que nous allons faire de la salade à la mahométane, mon doux ami, salade de mécréant poivrée de fils du Prophète.

— Arrête, mon frère, cria Roosje, ne verse point le sang du prochain.

— Ça le prochain, dit Ser Huygs s’animant à mesure et montrant Mahom, oui, tigre prochain, chacal prochain, hyène prochain. Sais-tu ce qu’il vient faire ici ? Me blesser après un loyal combat soutenu contre lui, pour t’enlever et te porter au pays des Maures, où tu devras te trouver bien heureuse de laver ses pieds de prince et de partager sa couche avec une vingtaine de galloises bonnes à fouetter le vendredi devant les bailles de la maison de ville.

— Ha ! sauvez-le, monseigneur Jésus, cria Roosje, qu’il croie en vous et qu’il se repente.

Puis s’échappant des bras de sa sœur et passant devant Ser Huygs, elle se jeta à genoux devant Mahom, qui sourit triomphalement de la voir ainsi humiliée.