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Page:De Merejkowsky - Le Roman de Léonard de Vinci, 1907.djvu/167

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d’une ville comme Berlinzona, capitale d’un pays paradisiaque, où les ceps de vigne s’attachaient avec des saucisses, où une oie coûtait un centime avec le caneton en supplément, où enfin existait une colline en fromage râpé sur laquelle vivaient des gens uniquement occupés à préparer du macaroni et des lasagnes, qu’ils faisaient cuire dans de la graisse de chapon et qu’ils jetaient au pied de la montagne. Celui qui en attrapait le plus en avait le plus. Et tout proche coulait une source de vernaccio – le meilleur vin de l’univers – ne contenant pas une goutte d’eau.

Ces discours alléchants furent interrompus par l’arrivée d’un petit homme scrofuleux, aux yeux mi-clos comme ceux d’un chat, Gorgolio, le verrier, grand cancanier et amateur de nouvelles.

— Messieurs, déclara-t-il triomphalement, en soulevant son vieux chapeau poussiéreux et essuyant la sueur qui inondait son front, messieurs, je viens du camp des Français !

— Que dis-tu, Gorgolio ? Sont-ils déjà ici ?

— Comment donc !… à Pavie… Ah ! laissez-moi respirer… Je suis essoufflé. J’ai couru si vite… ne voulant pas qu’un autre avant moi vous apprît la nouvelle.

— Tiens, voilà une chope ; bois et raconte. Quel peuple est-ce les Français ?

— Terrible, mes enfants. Ne mettez pas votre doigt dans leur bouche. Ce sont des hommes turbulents, sauvages, impies, de vrais fauves, en un mot des barbares ! Ils ont des pistolets et des arquebuses