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Page:De Musset - Voyage en Italie et en Sicile, 1866.djvu/167

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d’une signora fort élégante qu’on eût appelé une lionne si on eût connu ce mot-là. Un soir d’été, il y avait bal chez la signora et, comme dans ce pays-ci le bon ton n’oblige personne d’arriver le dernier, les calèches commencèrent à entrer dans la cour du palais à vingt-trois heures, c’est-à-dire une heure avant le coucher du soleil. Une troupe de curieux s’était amassée devant la porte. Agata elle-même parut à son balcon pour regarder les toilettes des belles dames.

Parmi les curieux se trouvait un garçon de dix-huit ans qu’on appelait Zullino, surnom qui dérive, je ne sais comment de Vincenzo, car il n’y a rien d’arbitraire ni de capricieux comme nos diminutifs. Zullino était un Sicilien de race normande. Il avait l’esprit gai, le cœur fier et les bras très robustes. Pour éviter l’affront d’un refus, il n’avait jamais parlé plus tendrement à Agata qu’aux autres jeunes-filles et se tenait pour dit qu’elle ne voulait pas d’amoureux. En regardant la fille du tailleur, Zullino s’aperçut qu’elle avait mis des roses dans ses cheveux.

— Donna Gattina, lui dit-il, je sais bien pourquoi vous vous couronnez de fleurs.

— Eh ! Pourquoi cela, don Zullino ?

— Parce que vous seriez bien aise d’aller au bal avec toutes ces belles dames qui vous passent devant le nez. Ne pouvant pas le faire, vous vous parez toute seule et il y a fête dans votre chambrette.

— J’en conviens, don Zullino. Je n’ai pas vu de bal et j’imagine que ce doit être une chose bien divertissante.

— Invitez-moi donc à votre petite fête. Votre mère jouera du tambour de basque et nous danserons