Page:De Sales - Introduction à la vie dévote, Curet, 1810.djvu/246

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besoins véritables et les justes occasions que nous en avons ; car enfin, Dieu veut que nous en usions ainsi pour son amour.

Mais, prenez garde que l’amour-propre ne vous trompe ; il contrefait quelquefois si bien l’amour de Dieu, que l’on diroit que c’est lui-même : et, pour éviter cette surprise, et le danger qu’il y a que ce soin légitime ne devienne une vraie avarice, il faut outre ce que j’ai dit au chapitre précédent, il faut, dis-je, pratiquer souvent une manière de pauvreté réelle et effective au milieu de toutes les richesses. Défaites-vous donc souvent de quelque partie de vos biens en faveur des pauvres : donner ce que l’on a, c’est s’appauvrir d’autant ; et plus vous donnerez, plus vous vous appauvrirez. Il est vrai que Dieu vous le rendra bien, et en l’autre vie et en celle-ci, puisqu’il n’y a rien qui fasse plus prospérer le temporel que l’aumône ; mais en attendant que Dieu vous le rende, vous participerez toujours au mérite de la pauvreté, O le saint et riche appauvrissement que l’aumône chrétienne !

Aimez les pauvres et la pauvreté, et cet amour vous rendra véritablement pauvre ; puisque, comme dit l’Écriture, nous devenons semblables aux choses que nous aimons. L’amour met de l’égalité entre les personnes qui s’aiment. Qui est infirme, disoit saint Paul, avec lequel je ne sois pas infirme ? Il pouvoit dire : qui est