Page:De Sales - Introduction à la vie dévote, Curet, 1810.djvu/34

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

consumoit ses habitans, c’est-à-dire, que l’air y étoit si méchant, que l’on ne pouvoit y vivre long-temps ; et que les naturels du pays étoient des hommes monstrueux, qui devoroient les autres hommes comme des sauterelles. C’est de cette sorte, Philothée, que le monde décrie tous les jours la sainte Dévotion, en publiant qu’elle rend l’esprit mélancolique et l’humeur insupportable ; et que pour en juger il n’y a qu’à voir l’air fâcheux, sombre et chagrin des personnes dévotes : mais comme Josué et Caleb, qui étoient allés reconnoitre la Terre promise, publioient partout que sa fertilité et sa beauté en rendoient le séjour heureux et délicieux, de même tous les Saints animés du Saint-Esprit et de la parole de Jésus-Christ, nous assurent que la vie dévote est douce, aimable et heureuse.

Le monde voit que les personnes dévotes jeûnent, prient, souffrent avec patience les injures qu’on leur fait, servent les malades, donnent l’aumône, veillent, répriment leur colère, font violence à leurs passions, se privent des plaisirs sensuels, et font beaucoup d’autres choses, qui sont naturellement fort pénibles : mais le monde ne voit pas la dévotion du cœur, laquelle rend toutes ces actions agréables, douces et faciles. Considérez les abeilles sur le thym ; elles y trouvent un suc fort amer, et en le suçant même, elles le changent en miel : nous le confessons donc, âmes mondaines,