Page:De Scudery - Alaric, ou Rome vaincue, 1654.djvu/277

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Et le Tibre dans peu comme elle le sera,
Par ce peuple aguerry qui nous attaquera.
L’empereur d’orient en mande la nouvelle,
Et dit qu’elle est certaine, et son advis fidelle :
Et cependant son frere, endormy comme il est,
Veille aussi peu pour nous, que pour son interest.
Il ne veut point le croire ; il ne veut point l’entendre ;
Ferons-nous comme luy ? Nous laisserons-nous prendre ?
Et mesprisant ainsi de si fiers ennemis,
Voulons-nous que les Goths nous trouvent endormis ?
Soustenons, soustenons la majesté romaine :
Alaric, si l’on veut, vient reprendre sa chaine :
Et si nous connoissons quel est nostre pouvoir,
L’esclave revolté connoistra son devoir.
Regardons, regardons, ces marques de victoire ;
Cét arc de Constantin, superbe et plein de gloire ;
Tous ces grands monumens de nos braves ayeuls,
Ces despoüilles des roys qu’ils surmonterent seuls ;
Ces superbes tombeaux des maistres de la terre ;
Ces aigles qui par tout ont porté le tonnerre ;
Ces sceptres, ces faisceaux, ces thrônes, et ces chars,
Et des premiers consuls, et des premiers Cezars.
Voulons-nous oublier par une erreur profonde,
Que nous sommes les fils de ces vainqueurs du monde ;
Que ce monde est à nous en estant possesseurs,
Et qu’il nous apartient comme leurs successeurs ?
Revoyons, revoyons, leurs illustres images,
Afin de r’animer nos bras et nos courages :