Page:De Scudery - Alaric, ou Rome vaincue, 1654.djvu/327

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Ainsi voulant gagner leur esprit mercenaire,
Tous deux estions trompez par leur ruse ordinaire.
Apres avoir souffert mille maux differents,
Probé ne parlant point j’aborday ses parents,
Et je leur proposay d’espouser cette belle :
Mais inutilement je fis agir leur zele :
Car la fiere Probé respondit en courroux,
Qu’elle seroit fidelle aux cendres d’un espoux.
Tiburse mon rival prenant la mesme voye,
Par la douleur qu’il eut me donna de la joye :
Il me vit affligé, je le vy fort confus ;
Et la mesme priere eut le mesme refus.
Enfin je resolus dans cette peine extrême,
De chercher à la voir, et de parler moy-mesme :
Afin que luy monstrant toute mon amitié,
Je pusse la toucher d’amour ou de pitié.
Pressé donc par l’effort d’un tourment sans exemple,
Sous l’habit d’un captif je l’attendis au temple :
Là tremblant de frayeur, sçachant sa cruauté,
Je me mis à genoux pres de cette beauté :
Et luy parlant fort bas, par respect et par crainte,
Avec plus d’un soûpir je fis ainsi ma plainte.
En vain, belle Probé, vous demandez aux cieux,
Une juste pitié que n’ont jamais vos yeux :
Vostre injuste courroux excite leur colere ;
Et demandant pardon, pardonnez à Valere.
Sous l’habit d’un esclave, esclave que je suis,
Apres avoir souffert et mille et mille ennuis,
Soûpirant vainement ma liberté ravie,