Page:De Scudery - Alaric, ou Rome vaincue, 1654.djvu/407

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voit, en voyant son intrepide cœur,
Qu’il est digne de vaincre, en n’estant pas vainqueur.
Mais à la fin il cede, il trébuche, il succombe :
Et le roy s’eslançant sur le guerrier qui tombe,
Console toy (dit-il, en prenant son escu)
Tu le peux, tu le dois, Alaric t’a vaincu.
Comme un vent enfermé sous les monts de Sicile,
Voulant se dégager, fait trembler toute l’isle :
Et ne peut toutefois, malgré ses grands efforts,
Renverser en sortant un si solide corps.
Ainsi le vaillant Grec que la tristesse tuë,
Sous les pieds du vainqueur, vainement s’esvertuë ;
Vainement se debat par un effort dernier ;
Et le grand roy des Goths le fait son prisonnier.
Alors comme du chef tous les membres dépendent,
Tous les Grecs sans le leur, se sauvent, ou se rendent :
Le desordre et la fuite alors sont veus par tout :
C’est un mal necessaire, où chacun se resoud :
Bataillons ; escadrons ; tout fuit, tout se renverse :
Et depuis les combats du vainqueur de la Perse,
L’univers estonné n’a point veu de heros,
Que l’on puisse égaler au vaillant roy des Goths.
On le voit triomphant sur le champ de bataille :
Mais tout couvert d’honneur son amour le travaille :
Il cherche Amalasonthe, et ne la trouve pas :
Sa victoire sans elle, est pour luy sans apas :
Il court de rang en rang ; il s’escrie ; il l’apelle ;
Tout le camp retentit du nom de cette belle :