Page:De Scudery - Alaric, ou Rome vaincue, 1654.djvu/409

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Toutes deux veulent vaincre ; et toutes deux alors,
Dans ce dernier duel font leurs derniers efforts.
L’exercice penible, et leur noble colere,
Rend leur teint plus vermeil, et leur fureur sçait plaire :
Et par une charmante et grande nouveauté,
Tout ce qui fait moins belle, augmente leur beauté.
Mais le destin du roy, plus puissant que leur haine,
Où se fait leur combat, le conduit et l’ameine :
Il les voit, il s’estonne ; et pour les empescher,
L’invincible Alaric se haste d’aprocher ;
L’invincible Alaric se jette entre leurs armes ;
Et regardant l’objet dont il connoist les charmes,
Il abaisse l’espée ; et d’un ton fort soûmis,
Faites plus, luy dit-il, que tous mes ennemis.
Ouy, faisant en ce jour ce qu’ils n’ont pas sceu faire,
Triomphez du vainqueur qui vient de les deffaire :
Rien ne resiste plus, à mon bras, à mes coups :
Contre le roy des Goths on ne voit plus que vous :
Sur-le-champ de bataille on ne voit pas un homme :
Vous tenez mon destin et le destin de Rome :
Terminez aujourd’uy de si grands differens :
Rendez vous ma princesse, ou sinon je me rends.
L’amazone à ces mots, soûrit, et belle, et fiere :
Alaric a vaincu, je suis sa prisonniere,
(Dit-elle, en presentant un fer si glorieux)
Et si je combas seule, il est victorieux.
Alors ce conquerant fait esclater sa joye :
Telle qu’il la ressent, telle il veut qu’on la voye :