Page:De Scudery - Alaric, ou Rome vaincue, 1654.djvu/466

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Et parmy les combats il fait voir trop de cœur,
Pour estre impitoyable et trop cruel vainqueur.
Mais quand cette esperance encor seroit trompée,
La faim, la pasle faim est pire que l’espée :
Et mourir pour mourir, je tiens qu’aux malheureux,
Le coup le plus subit est le moins rigoureux.
Sauvez donc la patrie en avançant sa perte :
Rome va succomber ; Rome s’en va deserte ;
Rome perd la raison ; Rome presques n’est plus ;
Et ses fameux travaux demeurent superflus.
J’armé vostre valeur contre un grand adversaire :
Je la desarme encor, puis qu’il est necessaire :
J’excité vostre main à ses premiers combats :
Je la porte en ce jour à ne combatre pas :
Un chemin different en mesme lieu nous meine :
Je parle contre Rome, et suis tousjours romaine :
Et si vostre amitié daigne enfin m’escouter,
Vostre honneur scrupuleux n’a rien à redouter.
Qu’entens-je ? Respond-il, et quelle est ma disgrace ?
Probé ne songe plus qu’elle est du sang d’Horace !
Et l’illustre Probé, malgré mes actions,
Ne connoist plus le sang des vaillans scipions.
Moy trahir ma patrie, et rendre Rome esclave !
Moy qui sorts d’un ayeul, et si grand, et si brave !
Moy qui de la fortune ay mesprisé les coups !
Moy de qui les desirs s’eslevent jusqu’à vous !
Non non, madame, non, je n’en suis point capable :
Et vous ne proposez un dessein si coupable ;
Un dessein