Page:De Scudery - Alaric, ou Rome vaincue, 1654.djvu/88

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Il se tourne au levant ; et puis à l’occident ;
Vers le septentrion ; vers le midy bruslant ;
Ses regards sont affreux ; sa teste herissée ;
Sa bouche est escumante, et sa voix opressée ;
Ses pas sont chancelans, d’un et d’autre costé ;
Son ame est agitée, et son corps agité ;
Enfin d’un ton de maistre, et d’une voix qui tonne,
Il prononce ces mots, dont la grote raisonne.
Esprits ingenieux, qui mille et mille fois,
Avez executé ce qu’a prescrit ma voix,
Icy tout de nouveau j’ay besoin de l’adresse
Qui vous rend si puissans, mais tost, la chose presse :
Et si mes volontez vous tiennent lieu de loy,
Empeschez, s’il se peut, les desseins d’un grand roy.
Empeschez qu’Alaric n’aborde en Italie :
Mon art vous le commande, et mon cœur vous en prie :
Enfin je vous evoque à cette intention :
Opposons-nous ensemble à son ambition :
Et puis que le demon est au-dessus de l’homme,
Que jamais ses drapeaux ne soient veus devant Rome :
C’est tout ce que je veux de l’enfer aujourd’huy :
Obeïssez demons, si je puis tout sur luy.
Alors sous cette grote on entend le tonnerre,
Qui semble s’eslever du centre de la terre :
Il gronde horriblement, et parmy ce grand bruit,
Mille esclairs sont meslez aux ombres de la nuit.
De longs gemissemens ces rochers retentissent :
Mille soûpirs font voir que les demons patissent :