Page:De Smet - Lettres choisies,1875.djvu/114

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se coupent jusqu’aux phalanges des doigts, avant d’aller en guerre, pour obtenir les mêmes faveurs de leurs fausses divinités. Dans ma dernière visite aux Riccarees, aux Minatarees et aux Mandans, je n’ai pu remarquer aucun homme un peu avancé en âge dont le corps ne fût mutilé et qui eût encore ses doigts intacts. Cela prouve la profondeur de leur ignorance et l’affreuse idolâtrie dans laquelle ces malheureuses tribus se trouvent encore plongées  ! À ce sombre tableau, on peut ajouter, ce que j’ai déjà rapporté ailleurs, un amour effréné pour le jeu, qui leur fait sacrifier jusqu’aux heures destinées au repos le plus nécessaire  ; une paresse qui ne cède qu’à l’aiguillon de la faim  ; un penchant continuel à la dissimulation, à la gourmandise, à tout ce qui flatte la basse sensualité. Et cependant, au milieu de cette déplorable misère, ils éprouvent le besoin indéfinissable d’invoquer une puissance supérieure à l’homme  ; ils sont attentifs à tout ce qui peut leur révéler quelque moyen de la fléchir, et leur donner quelque connaissance de l’Être suprême. Ils aiment le missionnaire, et toujours ils l’écoutent avec plaisir. Dans les différentes visites que j’ai faites aux sauvages du Haut-Missouri, à en juger par le respect et l’amitié qu’en ma qualité de prêtre ils m’ont témoignés dans toutes les occasions et toutes les circonstances, j’ai la ferme conviction que si quelque bon missionnaire pouvait s’occuper d’eux, ils deviendraient bientôt des chrétiens généreux,