Page:De Smet - Lettres choisies,1875.djvu/251

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

point changé de position. Pendant quatre jours et quatre nuits, j’ai eu la même vision, toujours accompagnée de plaintes et de reproches sur nos défaites récentes vis-à-vis des Pieds-Noirs. La cinquième nuit, un manitou m’adressa de nouveau la parole et me dit : « Tchatka, à l’avenir le tchant-cheê-ga sera ton Wah-kon… Lève-toi… Suis sans délai le sentier de la guerre qui mène chez les Pieds-Noirs. Aux sources de la Rivière-au-Lait, trente loges de tes ennemis se trouvent campées. Pars à l’instant, et après cinq jours de marche tu arriveras à leur camp. Le sixième jour, tu y feras un grand carnage. Chaque tête peinte sur le tambour représente une chevelure, et toutes ces chevelures réunies apaiseront les mânes de tes parents et amis défunts. Alors seulement ils pourront quitter l’affreuse demeure où tu les vois, pour entrer dans les belles plaines où règne l’abondance et où les souffrances et les privations sont inconnues… Dans ce moment même un parti de guerre de Pieds-Noirs rôde dans le voisinage du camp. Ils ont épié le moment favorable pour frapper un coup  ; mais, n’ayant pu y réussir, ils sont partis pour aller à la recherche d’un ennemi plus faible. Pars donc sans tarder  ; tu trouveras une victoire aisée, tu ne rencontreras dans le camp pied-noir que des vieillards, des femmes et des enfants. » — Telles furent les paroles du manitou, et il disparut. Je suis rentré dans mon corps  ; je suis