Page:De Smet - Lettres choisies,1875.djvu/266

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rangées de dents blanches. Il cachait son laid frontispice sous des touffes épaisses et crasseuses de cheveux noirs, collés ensemble avec de la gomme et de la résine mêlée de vermillon. Pendant plusieurs années qu’il visita le fort Union, à l’embouchure de la Roche-Jaune, il fut la terreur des enfants, car il était impossible de rencontrer une figure humaine plus affreuse et plus dégoûtante. Les marques de mépris qu’il recevait partout à cause de son extérieur ignoble, avaient fait naître en lui une haine implacable contre sa propre race. Le rusé Tchatka, s’étant aperçu des avantages qu’il retirerait d’un être de cette nature pour l’exécution de ses atroces desseins, se l’était associé depuis longtemps. Il le traitait avec bonté, lui faisait des présents, captivait sa confiance et flattait ses penchants vicieux. Il pouvait toujours compter sur ce misérable chaque fois qu’il s’agissait de faire du mal. N’avait-il pas administré si adroitement le poison aux deux jeunes guerriers, qu’aucun soupçon n’était tombé sur lui ni sur Tchatka  ? La perpétration de ce crime avait même ajouté un fleuron de plus à la réputation de Wahkon-tangka, qui, de loin comme de près, disposait à son gré de la vie de ses sujets.

Pendant les premières années que Tchatka fut à la tête de sa tribu, le succès couronna toutes ses entreprises, et son renom parcourut toute la contrée. Cependant, il arrivait parfois que ses guerriers étaient battus par l’ennemi. Dans ces occasions, il