Page:De Smet - Lettres choisies,1875.djvu/337

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tard, La Fayette revint à Buffalo. Tous les personnages notables vinrent lui rendre hommage. Dans le nombre se trouvait Jaquette Rouge. Le général français, qui n’avait pas oublié la magnifique séance de 1784, demanda ce qu’était devenu le jeune Iroquois dont il avait admiré l’éloquence. — «  Il est devant vous,   » — dit Jaquette Rouge en sortant des rangs et tendant la main au héros des deux mondes. Celui-ci observa que le temps les avait bien changés l’un et l’autre depuis leur première entrevue. — «  Il m’a plus maltraité que vous, répondit l’Indien  ; il vous a laissé tous vos cheveux, mais moi, — regardez.  » — Et ôtant son couvre-chef, il fit voir au général sa tête entièrement chauve.

Washington demanda un jour à Jaquette Rouge pourquoi les Iroquois n’adoptaient pas les usages européens. — « Ne sommes-nous pas tous frères  ? « ajouta-t-il. — «  Oui, répondit le sachem, les Indiens sont frères des Anglais comme les loups sont frères des chiens  ; mais le chien se fait au joug et à la chaîne  ; le loup préfère sa liberté.  »

Les missionnaires protestants firent vainement les plus grands efforts pour convertir Jaquette Rouge  ; il persista jusqu’à la mort dans la religion de ses pères. La première fois que les missionnaires vinrent prêcher dans sa tribu, il les écouta jusqu’au bout avec la plus profonde attention  ; puis il prit la parole à son tour, et voici ce qu’il leur dit :