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LA PRUSSE

lités telles qu’il en existoit dans le reste de l’Allemagne, de peur que l’action immédiate du service militaire ne pût être arrêtée par elles ; et cependant il souhaitoit qu’il y eût assez d’esprit de liberté dans son empire pour que l’obéissance y parût volontaire. Il vouloit que l’état militaire fût le premier de tous, puisque c’étoit celui qui lui étoit le plus nécessaire ; mais il auroit désiré que l’état civil se maintînt indépendant à côté de la force. Frédéric enfin vouloit rencontrer partout des appuis, mais nulle part des obstacles. L’amalgame merveilleux de toutes les classes de la société ne s’obtient guère que par l’empire de la loi, la même pour tous. Un homme peut faire marcher ensemble des éléments opposés, mais « à sa mort ils se séparent[1]. » L’ascendant de Frédéric, entretenu par la sagesse de ses successeurs, s’est manifesté quelque temps encore ; cependant on sentoit toujours en Prusse les deux nations qui en composoient mal une seule : l’armée, et l’état civil. Les préjugés nobiliaires subsistoient à côté des principes libéraux les plus prononcés. Enfin l’image de la Prusse offroit un

  1. Supprimé par la censure.