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DE L’ALLEMAGNE

remarquable qu’à présent ; mais il faut qu’un prince allemand encourage tout ce qui est allemand. Frédéric avoit le projet de rendre Berlin un peu semblable à Paris, et se flattoit de trouver dans les réfugiés français quelques écrivains assez distingués pour avoir une littérature française. Une telle espérance devoit nécessairement être trompée ; les cultures factices ne prospèrent jamais ; quelques individus peuvent lutter contre les difficultés que présentent les choses ; mais les grandes masses suivent toujours la pente naturelle. Frédéric a fait un mal véritable à son pays, en professant du mépris pour le génie des Allemands. Il en est résulté que le corps germanique a souvent conçu d’injustes soupçons contre la Prusse.

Plusieurs écrivains allemands, justement célèbres, se firent connoître vers la fin du règne de Frédéric ; mais l’opinion défavorable que ce grand monarque avoit conçue dans sa jeunesse contre la littérature de son pays ne s’effaça point, et il composa, peu d’années avant sa mort, un petit écrit, dans lequel il propose entre autres changements d’ajouter une voyelle à la fin de chaque verbe pour adoucir la langue tudesque. Cet allemand masqué en italien produiroit le plus comi-