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LA LITTÉRATURE ET LES ARTS

dymion, Ganymède, le Jugement de Pâris, etc. Les histoires chevaleresques sont nationales en Allemagne. Le génie naturel du langage et des poëtes se prête à peindre les exploits et les amours de ces chevaliers et de ces belles, dont les sentiments étoient tout à la fois si forts et si naïfs, si bienveillants et si décidés : mais en voulant mettre des grâces modernes dans les sujets grecs, Wieland les a rendus nécessairement maniérés. Ceux qui prétendent modifier le goût antique par le goût moderne, ou le goût moderne par le goût antique, sont presque toujours affectés. Pour être à l’abri de ce danger, il faut prendre chaque chose pleinement dans sa nature.

L’Obéron passe en Allemagne presque pour un poëme épique. Il est fondé sur une histoire de chevalerie française, Huon de Bourdeaux, dont M. de Tressan a donné l’extrait ; et le génie Obéron et la fée Titania, tels que Shakespear les a peints dans sa pièce intitulée Rêve d’une nuit d’été, servent de mythologie à ce poëme. Le sujet en est donné par nos anciens romanciers ; mais on ne sauroit trop louer la poésie dont Wieland l’a enrichi. La plaisanterie tirée du merveilleux y est maniée avec beaucoup de grâce et d’originalité.