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LA PHIOLOSOPHIE ET LA MORALE

qui déplaît tant aux partisans des idées absolues, Schelling rapporte tout à la nature, tandis que Fichte fait tout ressortir de l’âme. Fichte ne voit dans la nature que l’opposé de l’âme : elle n’est à ses yeux qu’une limite ou qu’une chaîne dont il faut travailler sans cesse à se dégager. Le système de Schelling repose et charme davantage l’imagination, néanmoins il rentre nécessairement dans celui de Spinosa ; mais au lieu de faire descendre l’àme jusqu’à la matière, comme cela s’est pratiqué de nos jours, Schelling tâche d’élever la matière jusqu’à l’âme ; et quoique sa théorie dépende en entier de la nature physique, elle est cependant très-idéaliste dans le fond, et plus encore dans la forme.

L’idéal et le réel tiennent, dans son langage, la place de l’intelligence et de la matière, de l’imagination et de l’expérience ; et c’est dans la réunion de ces deux puissances en une harmonie complète que consiste, selon lui, le principe unique et absolu de l’univers organisé. Cette harmonie, dont les deux pôles et le centre sont l’image, et qui est renfermée dans le nombre trois, de tout temps si mystérieux, fournit à Schelling les applications les plus ingénieuses. Il croit la retrouver dans les beaux-arts comme dans la