Page:De Staël – De l’Allemagne, Tome 3, 1814.djvu/183

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
165
INFLUENCE DE LA NOUVELLE PHILOSOPHIE.

et qu’on les croit les défenseurs spéculatifs les plus éclairés de la dignité humaine.

La sagacité de l’esprit philosophique leur à seulement appris à connoitre en toutes circonstances la cause et les conséquences de ce qui arrive, et il leur semble que, dès qu’ils ont trouvé une théorie pour un fait, il est justifié. L’esprit militaire et l’amour de la patrie ont porté diverses nations au plus haut degré possible d’energie ; maintenant ces deux sources de dénouement existent à peine chez les Allemands pris en masse. Ils ne comprennent guère de l’esprit militaire qu’une tactique pédantesque qui les autorise à être battus selon les règles, et de la liberté que cette subdivision en petits pays qui, accoutumant les citoyens à se sentir foibles comme nation, les conduit bientôt à se montrer foibles aussi comme individus[1]. Le respect pour les formes est

  1. Je prie d’observer que ce chapitre, comme tout le reste de l’ouvrage, a été écrit à l’époque de l’asservissement complet de l’Allemagne. — Depuis, les nations germaniques, réveillées par l’oppression, ont prêté à leurs gouvernements la force qui leur manquoit pour résister à la puissance des armées françaises, et l’on a vu, par la conduite héroïque des souverains et des peuples, ce que peut l’opinion sur le sort du monde.