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LA RELIGION ET L’ENTHOUSIASME.

« L’homme est avec la nature, dit Novalis, dans des relations presqu’aussi variées, presqu’aussi inconcevables que celles qu’il entretient avec ses semblables, et comme elle se met à la portée des enfants et se complaît avec leurs simples cœurs, de même elle se montre sublime aux esprits élevés et divine aux êtres divins. L’amour de la nature prend diverses formes, et tandis qu’elle n’excite dans les uns que la joie et la volupté, elle inspire aux autres la religion la plus pieuse, celle qui donne à toute la vie une direction et un appui. Déjà chez les peuples anciens il y avoit des âmes sérieuses pour qui l’univers étoit l’image de la divinité, et d’autres qui se croyoient seulement invitées au banquet qu’elle donne : l’air n’étoit, pour ces convives de l’existence, qu’une boisson rafraîchissante, les étoiles que des flambeaux qui présidoient aux danses pendant la nuit, et les plantes et les animaux que les magnifiques apprêts d’un splendide repas ; la nature ne s’offroit pas à leurs yeux comme un temple majestueux et tranquille, mais comme le théâtre brillant de têtes toujours nouvelles.

Dans ce même temps néanmoins des esprits