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Page:De Staël – La Révolution française, Tome I.djvu/385

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SUR LA RÉVOLUTION FRANÇOISE

ronne et son impuissance réelle jetoient les ministres et le monarque lui-même dans une anxiété toujours croissante ; certes il ne faut pas que vingt-cinq millions d’hommes existent pour un seul ; mais il ne faut pas non plus qu’un seul soit malheureux, même sous le prétexte du bonheur de vingt-cinq millions ; car une injustice quelconque, soit qu’elle atteigne le trône ou la cabane, rend impossible un gouvernement libre, c’est-à-dire, équitable.

Un prince qui ne se contenteroit pas du pouvoir accordé au roi d’Angleterre, ne seroit pas digne de régner ; mais, dans la constitution Françoise, la position du roi et de ses ministres étoit insupportable. L’état en souffroit plus encore que son chef ; et cependant l’assemblée ne vouloit ni éloigner le roi du trône, ni faire abnégation de ses défiances passagères quand il s’agissoit d’une œuvre durable.

Les hommes éminens du parti populaire, ne sachant pas se tirer de cette incertitude, mirent toujours dans leurs décrets le mal à côté du bien. L’établissement des assemblées provinciales étoit depuis long-temps désiré ; mais l’assemblée constituante les combina de manière à placer les ministres tout-à-fait en