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CONSIDÉRATIONS

des deux siècles qui se sont écoulés depuis.

L’édit de Nantes, publié en 1598, fondoit la tolérance religieuse pour laquelle on n’a point encore cessé de lutter. Cet édit opposoit une barrière au despotisme ; car, quand le gouvernement est obligé de tenir la balance égale entre deux partis opposés, c’est un exercice continuel de raison et de justice. D’ailleurs, comment un homme tel que Henri IV eût-il désiré le pouvoir absolu ? C’étoit contre la tyrannie de Médicis et des Guise qu’il s’étoit armé ; il avoit combattu pour en délivrer la France, et sa généreuse nature lui inspiroit bien plus le besoin de l’admiration libre, que de l’obéissance servile. Sully mettoit dans les finances du royaume un ordre qui auroit pu rendre l’autorité royale tout-à-fait indépendante des peuples ; mais Henri IV ne faisoit point ce coupable usage d’une vertu, l’économie : il convoqua donc l’assemblée des notables à Rouen, et voulut qu’elle fût librement élue, sans que l’influence du souverain eût part au choix de ses membres. Les troubles civils étoient encore bien récens, et l’on auroit pu se servir de ce prétexte pour remettre tous les pouvoirs entre les mains du souverain ; mais c’est dans la vraie liberté que se trouve le remède le plus efficace