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SUR LA RÉVOLUTION FRANÇAISE

très-capable d’en bien juger : « La raison d’état, voyez-vous, a remplacé chez les modernes le fatalisme des anciens. Corneille est le seul des tragiques françois qui ait senti cette vérité. S’il avoit vécu de mon temps, je l’aurois fait mon premier ministre. »

Il y avoit deux sortes d’instrumens du pouvoir impérial, les lois et les décrets. Les lois étoient sanctionnées par le simulacre d’un corps législatif ; mais c’étoit dans les décrets émanés directement de l’empereur, et discutés dans son conseil, que consistoit la véritable action de l’autorité. Napoléon abandonnoit aux beaux parleurs du conseil d’état, et aux députés muets du corps législatif, la délibération et la décision de quelques questions abstraites en fait de jurisprudence, afin de donner à son gouvernement un faux air de sagesse philosophique. Mais, quand il s’agissoit des lois relatives à l’exercice du pouvoir, alors toutes les exceptions, comme toutes les règles, ressortissoient à l’empereur. Dans le Code Napoléon, et même dans le Code d’Instruction criminelle, il est resté de très-bons principes, dérivés de l’assemblée constituante : l’institution du jury, ancre d’espoir de la France, et divers perfectionnemens dans la procédure, qui l’ont sortie