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SUR LA RÉVOLUTION FRANÇAISE

étoit menacé, toutes les autorités constituées l’ont vu ; et, comme j’étais moi-même une autorité constituée, il étoit de mon devoir de me défendre. Quelle manière modeste et indifférente de parler de soi, et par quel éclat d’éloquence pourroit-on attendrir plus profondément !

M. de Malesherbes, ancien ministre du roi, se présenta comme son défenseur. Il étoit l’un des trois hommes d’état, lui, M. Turgot et M. Necker, qui avoient conseillé à Louis XVI l’adoption volontaire des principes de la liberté. Il fut forcé, de même que les deux autres, à renoncer à sa place, à cause de ses opinions, dont les parlemens étoient ennemis ; et maintenant, malgré son âge avancé, il reparaissoit pour plaider la cause du roi en présence du peuple, comme jadis il avoit plaidé celle du peuple auprès du roi ; mais le nouveau maître fut implacable.

Garat, alors ministre de la justice, et, dans des temps plus heureux pour lui, l’un des meilleurs écrivains de France ; Garat, dis-je, a consigné dans ses mémoires particuliers que, lorsqu’il se vit réduit par sa funeste place à porter au roi la sentence qui le condamnoit à mort, le roi montra le calme le plus admirable