DANS la ville d’Inspruck, avant d’entrer en
Italie, Oswald entendit raconter à un négociant,
chez lequel il s’était arrêté quelque temps,
l’histoire d’un émigré français, appelé le comte
d’Erfeuil, qui l’intéressa beaucoup en sa faveur.
Cet homme avait supporté la perte entière
d’une très-grande fortune avec une sérénité
parfaite ; il avait vécu et fait vivre, par son
talent pour la musique, un vieil oncle qu’il avait
soigné jusqu’à sa mort ; il s’était constamment refusé
à recevoir les services d’argent qu’on s’était
empressé de lui offrir ; il avait montré la plus
brillante valeur, la valeur française, pendant la
guerre, et la gaieté la plus inaltérable au milieu
des revers : il désirait d’aller à Rome, pour y
retrouver un de ses parens dont il devait hériter,
et souhaitait un compagnon, ou plutôt
un ami, pour faire avec lui le voyage plus
agréablement.