LA foule empêcha Corinne de répondre à lord
Nelvil. On allait souper, et chaque cavaliere servente
se hâtait de s’asseoir à côté de sa dame. Une
étrangère arriva, et, ne trouvant plus de place, aucun homme, excepté lord Nelvil et le comte
d’Erfeuil, ne lui offrit la sienne : ce n’était ni
par impolitesse, ni par égoïsme, qu’aucun
Romain ne s’était levé ; mais l’idée que les grands
seigneurs de Rome ont de l’honneur et du devoir,
c’est de ne pas quitter d’un pas ni d’un instant
leur dame. Quelques-uns n’ayant pas pu
s’asseoir se tenaient derrière la chaise de leurs
belles, prêts à les servir au moindre signe. Les
dames ne parlaient qu’à leurs cavaliers ; les
étrangers erraient en vain autour de ce cercle,
où personne n’avait rien à leur dire. Car les femmes
ne savent pas en Italie ce que c’est que la
coquetterie, ce que c’est en amour qu’un succès
d’amour-propre ; elles n’ont envie de plaire qu’à
celui qu’elles aiment ; il n’y a point de séduction