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Page:De Staël - Corinne ou l'Italie, Tome I, 1807.djvu/218

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CORINNE OU L’ITALIE

mon caractère est tellement facile à connaître, que celui qui ne me comprendrait pas de lui-même ne me comprendrait pas davantage par l’explication que je lui en donnerais. La réserve pleine de vertu des femmes anglaises, et l’art plein de grâce des femmes françaises, servent souvent à cacher, croyez-moi, la moitié de ce qui se passe dans l’ame des unes et des autres : et ce qu’il vous plaît d’appeler en moi de la magie, c’est un naturel sans contrainte qui laisse voir quelquefois des sentimens divers et des pensées opposées, sans travailler à les mettre d’accord ; car cet accord, quand il existe, est presque toujours factice, et la plupart des caractères vrais sont inconséquens : mais ce n’est pas de moi dont je veux vous parler, c’est de la nation infortunée que vous attaquez si cruellement. Serait-ce mon affection pour mes amis qui vous inspirerait cette malveillance amère ? vous me connaissez trop pour en être jaloux ; et je n’ai point l’orgueil de croire qu’un tel sentiment vous rendît injuste au point où vous l’êtes. Vous dites sur les Italiens ce que disent tous les étrangers, ce qui doit frapper au premier abord : mais il faut pénétrer plus avant pour juger ce pays qui a été si grand à diverses époques. D’où vient donc que cette nation a