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CORINNE OU L’ITALIE

eux ; quand ils trompent leurs ennemis et leurs concurrens, c’est parce qu’ils se considèrent avec eux comme en état de guerre ; mais en paix, ils ont du naturel et de la vérité. C’est même cette vérité qui est cause du scandale dont vous vous plaignez ; les femmes entendant parler d’amour sans cesse, vivant au milieu des séductions et des exemples de l’amour, ne cachent pas leurs sentimens, et portent pour ainsi dire une sorte d’innocence dans la galanterie même ; elles ne se doutent pas non plus du ridicule, surtout de celui que la société peut donner. Les unes sont d’une ignorance telle, qu’elles ne savent pas écrire, et l’avouent publiquement ; elles font répondre à un billet du matin par leur procureur (il paglietto), sur du papier à grand format, et en style de requête. Mais en revanche, parmi celles qui sont instruites, vous en verrez qui sont professeurs dans les académies, et donnent des leçons publiquement en écharpe noire ; et si vous vous avisiez de rire de cela, l’on vous répondrait : Y a-t-il du mal à savoir le grec ? y a-t-il du mal à gagner sa vie par son travail ? pourquoi riez-vous donc d’une chose aussi simple ?

Enfin, Mylord, aborderai-je un sujet plus délicat ? chercherai-je à démêler pourquoi les