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Page:De Staël - Corinne ou l'Italie, Tome I, 1807.djvu/224

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CORINNE OU L’ITALIE

devoirs ; ils se sont considérés eux-mêmes comme plus coupables que les femmes, quand ils brisaient les liens de l’amour, parce que les femmes avaient fait plus de sacrifices, et perdaient davantage ; ils ont pensé que, devant le tribunal du cœur, les plus criminels sont ceux qui font le plus de mal : quand les hommes ont tort, c’est par dureté ; quand les femmes ont tort, c’est par faiblesse. La société, qui est à la fois rigoureuse et corrompue, c’est-à-dire impitoyable pour les fautes, quand elles entraînent des malheurs, doit être plus sévère pour les femmes ; mais, dans un pays où il n’y pas de société, la bonté naturelle a plus d’influence.

Les idées de considération et de dignité sont beaucoup moins puissantes, et même beaucoup moins connues, j’en conviens, en Italie, que partout ailleurs. L’absence de société et d’opinion publique en est la cause : mais, malgré tout ce qu’on a dit de la perfidie des Italiens, je soutiens que c’est un des pays du monde où il y a le plus de bonhomie. Cette bonhomie est telle dans tout ce qui tient à la vanité, que bien que ce pays soit celui dont les étrangers aient dit le plus de mal, il n’en est point où ils rencontrent un accueil aussi bienveillant. On reproche aux Italiens trop de