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Page:De Staël - Corinne ou l'Italie, Tome I, 1807.djvu/257

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CORINNE OU L’ITALIE

bas quelques mots à sa louange, espérant qu’elle les comprendrait sans qu’il fût obligé de les lui dire. Il avait cependant un désir si vif de savoir ce qu’elle pensait sur la tragédie, qu’il se hasarda, malgré sa timidité, à lui adresser la parole à cet égard.

— Madame, lui dit-il, ce qui me paraît surtout manquer à la littérature italienne, ce sont des tragédies ; il me semble qu’il y a moins loin des enfans aux hommes, que de vos tragédies aux nôtres : car les enfans, dans leur mobilité, ont des sentimens légers, mais vrais, tandis que le sérieux de vos tragédies a quelque chose d’affecté et de gigantesque qui détruit pour moi toute émotion. N’est-il pas vrai, lord Nelvil ? continua M. Edgermond, en se retournant vers lui et l’appelant par ses regards à le soutenir, étonné qu’il était d’avoir osé parler devant tant de monde.

— Je pense en entier comme vous, répondit Oswald. Métastase, que l’on vante comme le poëte de l’amour, donne à cette passion, dans tous les pays, dans toutes les situations, la même couleur. On doit applaudir à des ariettes admirables, tantôt par la grâce et l’harmonie, tantôt par les beautés lyriques du premier ordre qu’elles renferment, surtout quand on les détache du