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Page:De Staël - Corinne ou l'Italie, Tome I, 1807.djvu/92

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CORINNE OU L’ITALIE

égard, si, comme il en était certain, il se montrait embarrassé et froid par embarras.

Soit que Corinne s’aperçût de cette disposition d’Oswald, ou qu’une disposition semblable produisît en elle le désir d’animer la conversation pour faire cesser la gêne, elle se hâta de demander à lord Nelvil s’il avait vu quelques-uns des monumens de Rome. — Non, répondit Oswald. — Qu’avez-vous donc fait hier ? reprit Corinne en souriant. — J’ai passé la journée chez moi, dit Oswald : depuis que je suis à Rome, je n’ai vu que vous, madame, ou je suis resté seul. — Corinne voulut lui parler de sa conduite à Ancone ; elle commença par ces mots : — Hier j’ai appris… puis elle s’arrêta, et dit : — Je vous parlerai de cela quand il viendra du monde. — Lord Nelvil avait une dignité dans les manières qui intimidait Corinne ; et d’ailleurs elle craignait, en lui rappelant sa noble conduite, de montrer trop d’émotion ; il lui semblait qu’elle en aurait moins quand ils ne seraient plus seuls. Oswald fut profondément touché de la réserve de Corinne, et de la franchise avec laquelle elle trahissait, sans y penser, les motifs de cette réserve ; mais plus il était troublé, moins il pouvait exprimer ce qu’il éprouvait,